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dimanche 20 mai 2007

592 - Mensonges à durée indéterminée

Réussite professionnelle, assise sociale, respectabilité et reconnaissance par le mérite et le travail, lauriers, prestige et éclat par la fortune : les pires leurres du siècle passé éblouissent encore les membres les plus faibles, les moins évolués de notre société. Le profit matériel avant toute chose, la performance dans l'entreprise, la quête inlassable de la croissance économique à l'échelle nationale, la prospérité matérielle sur le plan individuel, la tentative d'épanouissement par les satisfactions les plus primaires, toutes ces aspirations futiles, immatures, irresponsables restent l'idéal de vie pour beaucoup de nos semblables encore englués dans leurs rêves de confort matériel.

Comme l'a si bien dénoncé le professeur Albert Jacquard, la poursuite d'une croissance économique sans fin est une pure aberration, une parfaite ineptie vouée au néant. Comme si un système économique pouvait indéfiniment courir après sa propre expansion, sans autre but que de s'étendre pour s'étendre... La recherche et l'entretien d'un équilibre économique au service de l'homme a plus de sens que la quête insatiable de croissance toujours plus effrénée, plus stérile au service de l'économie. L'évidence de cette sagesse pourtant élémentaire n'effleure même pas les esprits pollués par le conditionnement ambiant.

Sous nos molles latitudes les agences pour l'emploi, agences de travail intérimaire et autres sanctuaires dédiés à la cause socio-économique sont plus vénérés que les flèches de nos cathédrales désignant de célestes conquêtes. Une tête bien faite est avant tout une tête pour l'emploi. Le système ne reconnaît le salut que par l'effort dans le travail rémunéré, le sacrifice pour l'entreprise, le mérite professionnel. Celui qui s'écarte du chemin de l'emploi est un paria, un paresseux, un parasite, un rêveur improductif.

Subvenir à ses besoins superflus et à ceux de sa famille, partir au bord de la mer, offrir une cuisine équipée à sa femme, acheter une voiture neuve : le summum de la gloire. De nos jours le statut d'honnête homme s'obtient par les huit heures quotidiennes de travail rémunéré. Rien de moins, rien de plus.

Espoir des indigents, les agences pour l'emploi sont des boîtes à mirages qui font rêver le chômeur moyen persuadé que son salut est dans l'accès à l'automobile, à la propriété, aux loisirs... Vanité, insanités, misère de l'âme ! Ces promesses de bonheur sont aussi trompeuses que les images de nos écrans plasma qui, pour flatteuses qu'elles soient, ne changent en rien la qualité des programmes télévisés. Les bienheureux (les élus du système définitivement satisfaits de leur sort car sauvés de "l'enfer Chômage") auront beau posséder les écrans les plus chers, les plus plats, les plus vastes, les plus performants, invariablement ils applaudiront de sotte béatitude devant l'inanité de leurs émissions favorites... Peu importe, leur but sera atteint : faire partie des travailleurs. Un privilège. Une grâce. Un idéal.

Que l'on me permette de ne boire définitivement pas à cette fontaine de mensonges.

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